Présentation
En novembre 2014, des experts de 16 pays différents se sont réunis au Centre international de Recherche sur le Cancer (CIRC) pour évaluer les effets préventifs et indésirables des différentes méthodes de dépistage du cancer du sein (les membres du Groupe de Travail pour le volume 15 des Manuels de Prévention du Cancer du CIRC sont répertoriés à la fin de l’article ; leurs affiliations sont fournies dans l’Annexe supplémentaire, disponible avec le texte intégral de cet article sur NEJM.org). Cette mise à jour du Manuel du CIRC sur la prévention du cancer du sein1 de 2002 est d’actualité pour plusieurs raisons. Des améliorations récentes dans les résultats du traitement du cancer du sein de stade avancé et les préoccupations relatives au surdiagnostic militent en faveur d’une mise à jour. La définition de ce qui constitue la meilleure mise en œuvre des programmes de dépistage par mammographie (par exemple, quels groupes d’âge doivent être dépistés et à quelle fréquence) doit être revue à la lumière des résultats d’études récentes. De nouvelles études sur l’examen clinique des seins et l’auto-palpation légitiment aussi la réévaluation de ces pratiques de dépistage, et les techniques d’imagerie autres que la mammographie, qui n’ont pas été évaluées dans le manuel de 2002, méritent aujourd’hui une évaluation scientifique rigoureuse. Enfin, le dépistage des femmes à haut risque de cancer du sein exige une réévaluation rigoureuse, en particulier dans le contexte de l’amélioration des données actuellement disponibles sur les alternatives possibles de méthodes de dépistage.
En préparation de la réunion, l’équipe scientifique du CIRC a effectué des recherches de la littérature scientifique disponible sur la base des thématiques listées dans un document consensuel ; ces recherches ont été complétées par des membres du Groupe de Travail selon leur domaine d’expertise respectif. Les présidents du groupe et les membres des sous-groupes ont été sélectionnés par le CIRC selon leur domaine d’expertise et l’absence réelle ou apparente de conflits d’intérêts. Au cours de la réunion, on aura pris un soin tout particulier pour s’assurer que chaque résumé d’étude était rédigé ou révisé par une personne n’ayant pas de lien avec l’étude considérée. Toutes les études ont été évaluées et pleinement débattues, et un consensus sur les évaluations préliminaires a été atteint en sous-groupes avant que les évaluations n’aient été examinées par l’ensemble du Groupe de Travail. Durant le processus d’évaluation finale, le Groupe de Travail a discuté des évaluations préliminaires en vue d’atteindre un consensus (Pour plus de détails sur le processus utilisé et les critères d’évaluation, consulter les procédures de travail sur le site internet des manuels du CIRC2). Cet article résume brièvement l’évaluation des données scientifiques examinées au cours de la réunion (Tableau 1). Le rapport complet est présenté dans le volume 15 des Manuels de Prévention du Cancer du CIRC3.
Le cancer du sein est la cause de décès par cancer la plus fréquemment diagnostiquée chez les femmes dans le monde entier4,5, la deuxième cause de décès par cancer chez les femmes dans les pays développés4,5, et, la principale cause de décès par cancer dans les pays à revenu faible et intermédiaire, où une forte proportion de femmes sont diagnostiquées à un stade avancé de la maladie, ce qui conduit à un pronostic défavorable6. Les facteurs de risques reconnus de cancer du sein sont l’âge, l’histoire familiale ou personnelle de cancer du sein ou de lésions précancéreuses, les facteurs génésiques, le traitement hormonal, la consommation d’alcool, l’obésité (seulement pour le cancer du sein post-ménopausique), l’exposition à des rayonnements ionisants, et la prédisposition génétique7.
Le dépistage du cancer du sein vise à réduire la mortalité associée à ce cancer, ainsi que la morbidité associée à des stades avancés de la maladie, par une détection précoce chez les femmes asymptomatiques. La clé pour réaliser les plus grands effets potentiels de ce dépistage est de fournir un accès rapide à des services de diagnostic et de traitement efficaces. Une démarche d’assurance-qualité globale est essentielle au maintien d’un équilibre approprié entre les avantages et les inconvénients8.
Tableau 1. Évaluation des données scientifiques sur les bénéfices et les effets indésirables des différentes méthodes de dépistage du cancer du sein auprès de la population générale et des femmes à haut risque*.
Méthode | Niveau d’indications† |
Mammographie | |
Réduit la mortalité par cancer du sein chez les femmes âgées de 50 à 69 ans | Suffisant |
Réduit la mortalité par cancer du sein chez les femmes âgées de 70 à 74 ans‡ | Suffisant |
Réduit la mortalité par cancer du sein chez les femmes âgées de 40 à 44 ans§ | Limité |
Réduit la mortalité par cancer du sein chez les femmes âgées de 45 à 49 ans§ | Limité¶ |
Détecte des cancers du sein qui n’auraient jamais été diagnostiqués ou n’auraient jamais causé de préjudice si les femmes n’avaient pas été dépistées (surdiagnostic) | Suffisant |
Réduit la mortalité par cancer du sein chez les femmes âgées de 50–74 ans au point que ses bénéfices l’emportent nettement sur le risque de cancers radio-induits lié à la mammographie | Suffisant |
Induit des conséquences psychologiques négatives à court terme lorsque le résultat est un faux positif | Suffisant |
Présente un bénéfice net pour les femmes âgées de 50 à 69 ans invitées à participer au dépistage organisé par mammographie. | Suffisant |
Peut être coût-efficace pour les femmes âgées de 50 à 69 ans dans les pays ayant une forte incidence de cancer du sein | Suffisant |
Peut être coût-efficace dans les pays à faible et moyen revenus | Limité |
Echographie en complément de la mammographie chez les femmes aux seins denses dont les résultats de la mammographie sont négatifs | |
Réduit la mortalité par cancer du sein | Insuffisant |
Augmente le taux de détection de cancers du sein | Limité |
Réduit le taux de cancers de l’intervalle | Insuffisant |
Augmente la proportion de faux positifs liés au dépistage | Suffisant |
Mammographie avec tomosynthèse vs mammographie seule | |
Réduit la mortalité par cancer du sein | Insuffisant |
Augmente le taux de détection de cancers in situ et de cancers invasifs | Suffisant |
Augmente préférentiellement la détection des cancers invasifs | Limité |
Réduit le taux de cancers de l’intervalle‖ | Insuffisant |
Réduit la proportion de faux positifs liés au dépistage | Limité |
Examen clinique des seins | |
Réduit la mortalité par cancer du sein | Insuffisant |
Décale la distribution des stades de tumeurs détectées vers un stade inférieur | Suffisant |
Auto-palpation | |
Réduit la mortalité par cancer du sein lorsqu’elle est enseignée | Insuffisant |
Réduit les taux de cancers de l’intervalle lorsqu’elle est enseignée | Insuffisant |
Réduit la mortalité par cancer du sein lorsqu’elle est pratiquée de façon compétente et régulière | Insuffisant |
Dépistage des femmes à haut risque | |
IRM en complément de la mammographie | |
Réduit la mortalité par cancer du sein chez les femmes porteuses d’une mutation BRCA1 ou BRCA2 | Insuffisant |
Augmente le taux de détection de cancer du sein chez les femmes souffrant d’un carcinome lobulaire in situ ou de proliférations atypiques | Insuffisant |
Examen clinique des seins en complément de l’IRM et à la mammographie | |
Augmente le taux de détection de cancer du sein chez les femmes à risque familial élevé | Insuffisant |
Echographie en complément de la mammographie | |
Augmente le taux de détection de cancer du sein chez les femmes ayant des antécédents personnels de cancer du sein | Insuffisant |
Augmente la proportion de faux positifs liés au dépistage chez les femmes ayant des antécédents personnels de cancer en comparaison de celles sans antécédents personnels | Insuffisant |
IRM en complément de la mammographie plus échographie | |
Augmente la proportion de résultats faux positifs chez les femmes ayant des antécédents personnels de cancer du sein par rapport à celles qui n’en ont pas | Insuffisant |
IRM en complément de la mammographie vs mammographie seule | |
Augmente la proportion de faux positifs chez les femmes souffrant d’un carcinome lobulaire in situ ou de proliférations atypiques | Limité |
* Pour accéder aux évaluations complètes, voir le Centre international de Recherche sur le Cancer2 ou le site internet des Manuels de Prévention du Cancer (http://handbooks.iarc.fr). IRM : Imagerie par Résonance Magnétique.
† Pour des informations détaillées sur les critères d’évaluation, voir les procédures de travail dans la section correspondante sur le site internet des Manuels de Prévention du Cancer https://handbooks.iarc.fr/preambles/previous-working-procedures/
‡ Les indications en faveur d’une réduction de la mortalité par cancer du sein associée à la mammographie de dépistage chez les femmes de ce groupe d’âge ont été considérées comme suffisantes. Cependant, les données publiées pour cette catégorie d’âge n’ont pas permis de conclure à un bénéfice net.
§ Les indications d’une réduction de la mortalité par cancer du sein associée à la mammographie de dépistage chez les femmes de ce groupe d’âge ont été considérées comme limitées. Par conséquent, le bénéfice net pour les femmes de ce groupe d’âge n’a pas été évalué.
¶ Une majorité de membres votants du Groupe de Travail du CIRC a estimé que les indications étaient limitées ; néanmoins, le vote s’est réparti de façon presque égale entre des niveaux d’indications limitées et suffisantes.
‖ Un cancer de l’intervalle est un cancer qui se développe dans l’intervalle de temps entre les dépistages habituels de ce cancer.
La méthode de dépistage du cancer du sein la plus courante chez les femmes est la mammographie standard (cliché ou numérique), proposée soit dans le cadre de programmes organisés, soit lors d’un dépistage opportuniste. Le dépistage organisé est caractérisé par l’envoi à une population cible d’invitations à s’y soumettre à intervalles réguliers, par des rappels systématiques pour l’évaluation d’anomalies détectées, par la transmission des résultats des examens, le traitement et les soins de suivi, avec une surveillance régulière, et par l’évaluation du programme. Une équipe nationale ou régionale est responsable du service rendu et de sa qualité. Le dépistage opportuniste consiste à dépister les femmes qui le demandent ou lorsque ce dépistage coïncide avec leur suivi de santé habituel.
Suite aux résultats des essais randomisés contrôlés qui ont montré une réduction de mortalité par cancer du sein il y a plusieurs décennies1, le dépistage par mammographie a été mis en place en grande partie dans les régions et pays à revenu élevé et dans une plus faible mesure dans les pays d’Europe centrale et orientale, par dépistage opportuniste ou organisé. La plupart des pays d’Amérique latine ont des recommandations ou des directives au niveau national, y compris celles recommandant le dépistage par mammographie associée à un examen clinique des seins et à l’auto-palpation. Dans d’autres pays à revenu faible et intermédiaire, le dépistage du cancer du sein est promu principalement par des organisations et des campagnes périodiques visant à une sensibilisation sur le cancer du sein.
En 2002, sur la base des résultats d’essais randomisés contrôlés, le Groupe de Travail du précédent Manuel du CIRC avait conclu que les indications sur « l’efficacité** du dépistage par mammographie comme unique moyen de dépistage pour réduire la mortalité par cancer du sein » étaient suffisantes pour les femmes de 50 à 69 ans, limitées pour les femmes de 40 à 49 ans, et insuffisantes pour les femmes de moins de 40 ou de plus de 69 ans1. Nous avons réexaminé attentivement les résultats de tous les essais randomisés contrôlés disponibles et réaffirmé les conclusions de l’évaluation précédente sur l’efficacité de la mammographie de dépistage chez les femmes de 50 à 69 ans ; les indications d’efficacité pour les femmes dans les autres groupes d’âge ont été jugées insuffisantes.
Le Groupe de Travail a reconnu que la pertinence des essais randomisés contrôlés menés il y a plus de 20 ans devait être remise en question, compte tenu des améliorations à grande échelle survenues depuis lors, et ce tant dans l’équipement nécessaire pour réaliser une mammographie que dans les traitements pour le cancer du sein. Plus récemment, des études observationnelles de grande qualité ont fourni les données les plus robustes permettant d’évaluer l’efficacité réelle** du dépistage par mammographie. Le Groupe de Travail a donné le plus de poids aux études de cohortes qui présentaient de longues périodes de suivi et les protocoles les plus robustes, incluant celles qui tiennent compte du temps de devancement, qui minimisent les différences temporelles et géographiques entre les participants dépistés et non dépistés, et qui contrôlent les différences individuelles qui pourraient être liées à l’effet étudié. Les analyses des invitations aux dépistages (plutôt que la participation effective) ont été considérées fournir les meilleures d’indications de l’efficacité réelle du dépistage, puisqu’elles s’approchent des circonstances d’une analyse d’intention de traiter dans un essai randomisé contrôlé. Après un examen attentif des limites des études cas-témoins dans l’évaluation de l’efficacité réelle, ces études ont également été considérées fournir des informations pertinentes pour les programmes organisés de dépistage et à d’autres dispositifs, tels que le dépistage opportuniste, pour lequel des données issues de cohorte n’étaient pas disponibles. Parmi les études écologiques, seules celles contrôlant les facteurs liés au temps et au traitement dans leur protocole ou leur analyse ont été considérées comme informatives.
Les 20 études de cohorte et les 20 études cas-témoins, toutes menées dans des pays développés (Australie, Canada, Europe ou Etats-Unis) ont été considérées comme informatives pour évaluer l’efficacité réelle des programmes de dépistage par mammographie, d’après l’invitation ou la participation effective, pour la plupart à intervalles de 2 ans. La plupart des études de mortalité de cohorte basées sur l’incidence, impliquant des femmes invitées à participer au dépistage9–13 ou des femmes participant au dépistage14–17, ont rapporté une nette réduction de la mortalité par cancer du sein, bien que certaines estimations relatives aux femmes invitées n’étaient pas statistiquement significatives12,13. Les femmes de 50 à 69 ans invitées à se rendre à un dépistage par mammographie avaient, en moyenne, une réduction de 23 % du risque de décès par cancer du sein ; les femmes ayant participé à un dépistage par mammographie présentaient une réduction plus importante du risque, estimée à environ 40 %. Les études cas-témoins qui fournissent des analyses de l’invitation au dépistage étaient largement en accord avec ces résultats. Les résultats du faible nombre d’études écologiques informatives étaient en grande partie en accord avec celui des études de cohorte et des études cas-témoins. Une réduction substantielle du risque de décès par cancer du sein a été également observée de façon récurrente chez les femmes de 70 à 74 ans qui étaient invitées ou qui avaient participé à un dépistage par mammographie dans plusieurs études de mortalité de cohorte basées sur l’incidence17–19. Quelques études ont évalué l’efficacité réelle du dépistage chez les femmes de 40 à 44 ou de 45 à 49 ans qui avaient été invitées à participer ou qui se sont soumises à un dépistage par mammographie, et la réduction du risque dans ces études était généralement moins prononcée20-23. Dans l’ensemble, les données disponibles ne permettent pas d’établir l’intervalle de dépistage le plus approprié.
Les dommages les plus importants associés à la détection précoce du cancer du sein par mammographie de dépistage sont les résultats faussement positifs, le surdiagnostic et la possibilité de cancer radio-induit. Les estimations du risque cumulé de résultats faux positifs diffèrent entre les programmes organisés et le dépistage opportuniste. L’estimation du risque cumulé des programmes organisés est d’environ 20 % pour une femme qui a eu 10 dépistages entre 50 et 70 ans24. Moins de 5 % de tous les faux-positifs dépistés ont entraîné une procédure invasive. En raison des différences dans les systèmes de santé et du contrôle-qualité de la performance du dépistage, les taux de rappel pour des investigations complémentaires ont tendance à être plus élevés dans le dépistage opportuniste (par exemple, aux Etats-Unis)25 que dans les programmes organisés de dépistage. Dans l’ensemble, les études montrent qu’avoir une mammographie faussement positive a des conséquences psychologiques négatives à court terme pour certaines femmes26.
Le surdiagnostic peut être estimé sur la base des données d’études observationnelles menées dans les programmes organisés ou par modélisation statistique. La méthode à privilégier pour estimer le surdiagnostic est largement débattue. Après une revue approfondie des données de la littérature disponible, le Groupe de Travail a conclu que la meilleure estimation du surdiagnostic était égale à la différence des probabilités cumulées de détection du cancer du sein chez les femmes dépistées et chez les femmes non dépistées, après prise en compte d’un temps de devancement suffisant. Le Groupe de Travail Euroscreen a calculé une estimation moyenne de surdiagnostic de 6,5 % (intervalle : 1 à 10 %) sur la base de données provenant d’études menées en Europe qui étaient ajustées à la fois sur les délais et sur les tendances contemporaines d’incidence27,28. Lorsque les mêmes éléments de comparaison ont été utilisés, les estimations de surdiagnostic dans les essais randomisés contrôlés après une longue période de suivi à la fin du dépistage étaient similaires (4 à 11 %)29,30. Des études similaires non européennes et des études observationnelles européennes plus récentes ont conduit à des estimations de surdiagnostic plus élevées.
Le cancer du sein radio-induit est un sujet de préoccupation chez les femmes à qui l’on propose un dépistage. L’estimation du risque cumulé de décès par cancer du sein dû aux rayonnements issus du dépistage par mammographie va de 1 à 10 pour 100 000 femmes, selon l’âge, la fréquence et la durée du dépistage. Il est inférieur d’un facteur d’au moins 10031 aux estimations des décès par cancer du sein prévenus par mammographie pour un large éventail d’âges.
Après une évaluation méticuleuse des bénéfices et des effets indésirables du dépistage par mammographie, le Groupe de Travail a conclu qu’il y a un bénéfice net à inviter les femmes âgées de 50 à 69 ans à participer au dépistage. Un certain nombre d’autres techniques d’imagerie ont été développées pour le diagnostic, dont certaines sont en cours d’investigation pour le dépistage. La valeur de la tomosynthèse, de l’imagerie par résonance magnétique (IRM) (avec ou sans l’administration d’un produit de contraste), de l’échographie (portable ou automatisée), de la tomographie par émission de positons et de la mammographie par émission de positons, comme méthodes complémentaires de dépistage de la population générale ou des femmes à haut risque en particulier, a été ou est en cours d’investigation.
Les indications concernant le dépistage des populations à l’aide d’autres techniques d’imagerie sont uniquement basées sur des données issues d’études observationnelles. Une échographie complémentaire chez les femmes ayant des seins denses après une mammographie négative, peut augmenter le taux de détection des cancers, mais elle augmente aussi le taux de faux positifs32. Par rapport à la mammographie seule, la mammographie avec tomosynthèse augmente les taux de détection à la fois des cancers in situ et des cancers invasifs et semble réduire le nombre dee faux positifs33, mais les indications d’une réduction de la mortalité par cancer du sein étaient insuffisantes (Tableau 1) et la dose de rayonnements reçue avec cette double acquisition est augmentée.
L’examen clinique des seins est une technique simple et peu coûteuse. Dans trois essais dans lesquels les femmes ont été randomisées pour soit subir un examen clinique des seins, soit aucun dépistage, les cancers du sein détectés au départ et dans les premières années des essais avaient tendance à être de taille plus réduite et à un stade moins avancé dans le premier groupe de femmes que dans le second34–36. Les résultats sur la mortalité par cancer du sein n’ont pas encore été rapportés. En outre, cinq études observationnelles, menées principalement dans les années 1970, montrent que l’examen clinique des seins associé au dépistage par mammographie augmentait le taux de détection de cancer du sein de 5 à 10 % par rapport à la mammographie seule1.
Comme cela a été indiqué précédemment1, les données disponibles d’essais randomisés contrôlés et d’études observationnelles ne montraient généralement pas de réduction de la mortalité par cancer du sein lors de l’auto-palpation, qu’elle soit enseignée ou pratiquée de façon compétente et régulière (Tableau 1). Dans l’ensemble, les enquêtes en population générale ont montré que le nombre de femmes qui déclarent pratiquer l’auto-palpation sont probablement trop peu nombreuses pour que cela ait un effet sur la mortalité par cancer du sein.
Les femmes ayant des antécédents familiaux de cancer du sein, avec ou sans prédisposition génétique connue, ont un risque accru de cancer du sein et peuvent donc bénéficier d’une surveillance renforcée, avec une combinaison de méthodes, à un âge plus précoce et, éventuellement, à des intervalles plus courts que les femmes à risque moyen. Cependant, les femmes à haut risque peuvent être plus sensibles aux rayonnements ionisants37, et le dépistage à un âge plus précoce augmente le risque de cancer radio-induit. Un certain nombre d’études observationnelles ont évalué la sensibilité, la spécificité, l’augmentation du taux de détection de cancer du sein, et les résultats faux positifs associés aux diverses techniques d’imagerie chez les femmes à haut risque (Tableau 1). Il existe une littérature abondante montrant que l’utilisation de l’IRM en complément de la mammographie augmente de façon significative la sensibilité du dépistage chez les femmes présentant un haut risque familial et une mutation BRCA1 ou BRCA2 par rapport à la mammographie seule, mais l’ajout de l’IRM fait aussi baisser la spécificité38 ; les données pour d’autres groupes à haut risque étaient moins nombreuses et fournissent des indications plus faibles39. La sensibilité de l’échographie était similaire ou inférieure à celle de la mammographie et était toujours inférieure à celle de l’IRM40. Les indications relatives aux autres techniques de dépistage étaient trop rares pour permettre de conclure.
**Note du traducteur : « efficacy » a été traduit par « efficacité », et « effectiveness » a été traduit par « efficacité réelle ».
Aucun conflit d’intérêts potentiel pertinent pour cet article n’a été rapporté.
Les formulaires de déclaration fournis par les auteurs sont disponibles avec le texte intégral de cet article à NEJM.org.
Du Centre international de Recherche sur le Cancer, Lyon, France (B.L.‑S., C.S., D.L., L.B.‑T., V.B., K.S.) ; et le Centre allemand de Recherche sur le Cancer (DKFZ), Heidelberg, Allemagne (F.B.).
Les membres du Groupe de Travail du Manuel du CIRC étaient Bruce Armstrong, Président; Ahti Anttila, vice‑président; Harry J. de Koning, Robert A. Smith, David B. Thomas, et Elisabete Weiderpass, Présidents des sous-groupes; Benjamin O. Anderson, Rajendra A. Badwe, Ronaldo Corrêa Ferreira da Silva, Geertruida H. de Bock, Stephen W. Duffy, Ian Ellis, Chisato Hamashima, Nehmat Houssami, Vessela Kristensen, Anthony B. Miller, Raul Murillo, Eugenio Paci, Julietta Patnick, You‑Lin Qiao, Agnès Rogel, Nereo Segnan, Surendra S. Shastri, and Marit Solbjør; Sylvia H. Heywang‑Köbrunner and Martin J. Yaffe, spécialistes invités ; David Forman, Lawrence von Karsa, et Rengaswamy Sankaranarayanan.
Cet article a été publié en anglais le 3 juin 2015 à NEJM.org. Accessible ici.